AJACCIO

FORUM MEDITERRANEEN SUR L’ENERGIE

2-3 octobre 2003

Services Publics, développement, environnement.
Pour une Méditerranée solidaire

 

 

Publication disponible

Avoir choisi la Corse pour accueillir le Forum méditerranéen de l’Energie ne doit rien au hasard.
La Corse est au cœur de la Méditerranée comme l’énergie est au cœur de l’homme.

Les coupures et rationnement de cet hiver 2005 nous font comprendre mieux pourquoi les électriciens et gaziers de l’île de beauté n’ont eu de cesse de poser la question de l’indépendance énergétique.

Une indépendance qui ne peut exister sans de véritables solidarités de co développement entre partenaires du sud et du nord de la Méditerranée.

C’est donc à partir des situations de la Corse et de la Sardaigne et de la perspective de la construction d’un nouveau gazoduc Algérie-Europe, que professionnels, acteurs de l’énergie et éminents spécialistes français, algériens et italiens, ont, à l’initiative du Festival TransMéditerranée, du Conseil Supérieur Consultatif des Comités Mixtes à la Production et de la Caisse Centrale des Activités Sociales des personnels des industries électrique et gazière de Corse, croisé leurs réflexions et expériences à Ajaccio les 2 et 3 octobre 2003.

Cette rencontre a réuni deux jours durant une centaine de participants autour de thèmes et enjeux comme l’énergie en relation avec le service public, l’environnement, le développement, la coopération, et bien sûr, l’énergie comme droit élémentaire

 

De gauche à droite:
Paul Euzière; Réné Camporesi; César Fazzini; Giuseppe Podda; Abdenour Keramane

 

DEROULEMENT DES JOURNEES:

*Jeudi 2 octobre

9h00: Accueil,

Allocutions d’Ouverture:

César Fazzini Président de l’Union Régionale de la CCAS des électriciens et gaziers de Corse,
Paul Euzière, Président du Festival TransMéditerranée10h00. Energie, Entreprises et Service public, un enjeu des deux rives
René Camporesi, secrétaire du CSC des CMP d’EDF –GDF

10h00. Energie, Entreprises et Service public, un enjeu des deux rives

Abdenour Keramane Ancien ministre, ancien PDG de Sonelgaz, Fondateur de « Med Energie », Algérie
Giuseppe Podda, Secrétaire général FNEL -CGIL Sardaigne

11h30: Débat

14h00: Energie , Environnement, Développement

Pascal Acot, historien de l’écologie, chercheur au CNRS
Serge Perez, Commissariat à l’Energie Atomique, Association Droit à l’énergie
Paul Sindic, Juriste, spécialiste du développement et de la coopération, ancien administrateur d’Elf Aquitaine

16h00: débat

Abdenour Keramane

 

Vendredi 3 octobre

9h00: Energie et service public, les droits élémentaires

Cathy Polo , Administratrice EDF-GDF
Mohamed Bedreddine, Secrétaire national de l’UGTA, Algérie
Michel Clerc, Président de l’Association Droit à l’énergie
Marie-Noëlle Lienemann, ancien ministre

11h00: Débat

14h00: L’énergie en Méditerranée, quel partage équitable ?

Patrick Ribau, géographe, chercheur au CNRS, membre des laboratoires SEDET et GREMAMO et du comité de rédaction de la revue La Pensée
Sylvain Brossaud, secrétaire du Comité européen d’entreprise- branche énergie

16h00: Débat
17h30: Clôture

Télécharger la liste des participants (pdf)

 

Sylvain Brossaud et Paul Euzière

 

FORUM MEDITERRANEEN SUR L’ENERGIE


Intervention de Paul Euzière

 

  En juin 1996 déjà, le Festival Transméditerranée coorganisait à Bastia, avec la Ville et la Caisse centrale des Activités Sociales des Electriciens et Gaziers (CCAS), un colloque international intitulé « Méditerranée, carrefour des solidarités ; l’Energie et l’Eau au cœur des enjeux ».

Il y avait là de nombreuses personnalités souvent éminentes, venues de quelques douze pays de notre mer commune, parmi lesquelles vous me permettrez de distinguer tant leur vie a valeur d’exemple Mgr Pierre Claverie –Evêque d’Oran assassiné par les intégristes islamistes- et la Grecque Maria Gazi, pivot discret et tellement efficace de la solidarité concrète avec le Proche-Orient.
Il y avait aussi un brillant intellectuel palestinien d’origine juive, Ilan Halevy, aujourd’hui vice-ministre des Affaires Etrangères de Palestine.
Toutes ces figures de premier plan de l’histoire et de l’actualité méditerranéennes auxquelles étaient venus se joindre, dans leur diversité, pour de riches échanges, de nombreux chercheurs et syndicalistes de Corse et du continent, avaient relevé le caractère décisif que prendraient, dans les années à venir, les questions de l’Energie et de l’Eau.
Sept ans plus tard, l’Irak et le monde sortent d’une guerre où, au delà des prétextes mensongers sur les armes de destruction massive, apparaît chaque jour plus clairement la dimension pétrolière –donc énergétique- de ce conflit.

Qui pourrait d’ailleurs douter de la centralité des questions de l’Energie, quant on constate que cette année le Nord-Est des Etats-Unis, puis l’Italie, mais aussi l’Algérie, ont été frappés successivement par des coupures d’électricité sans précédent dans l’Histoire ?

Dans son édition du 30 septembre 2003, un journaliste du quotidien « Le Monde » écrivait à propos de la gigantesque panne du 28 septembre qui a paralysé toute l’Italie « plus que les supposés méfaits de la libéralisation du marché, c’est son aspect inabouti qui en est la cause ».
« La nationalisation ou la bougie ! » résumait lapidairement un hebdomadaire satirique français à la fin de l’été.
Il est évident que sur ce sujet comme sur d’autres : la construction européenne ou la mondialisation, existent des approches différentes, des divergences, voire des positions contradictoires.
Ce n’est pas gênant, au contraire.


Depuis 14 ans que le Festival TransMéditerranée existe et qu’il s’emploie à tisser des réseaux de solidarité, nous avons toujours privilégié la connaissance et le respect de l’autre qui passent par le débat contradictoire et citoyen. Cela, toujours dans une perspective d’émancipation de l’homme et des peuples.
C’est encore le cas pour ce forum international pour lequel se sont associés le Conseil Supérieur Consultatif des Comités Mixtes à la Production, l’Union régionale Corse de la CCAS et le Festival TransMéditerranée, partenaires depuis dix ans d’actions culturelles et de solidarité à partir des problématiques spécifiques aux travailleurs de l’énergie, mais aussi des grands défis civilisationnels d’aujourd’hui.


Nous allons donc au cours de ces deux journées aborder plus spécifiquement la construction de solidarités autour des grands projets euro-méditerranéens, particulièrement la question du gaz et de la mise en place d’un nouveau gazoduc Algérie-Italie -cette fois via la Sardaigne- qui pourrait passer par la Corse, l’alimenter en énergie créatrice d’emplois en préservant son autonomie énergétique.

Incontestablement, la passage par la Corse du gazoduc Algérie-Italie serait une réponse d’avenir aux problèmes posés par le vieillissement des deux centrales du Vazzo et de Lucciana, une réponse s’inscrivant dans la convergence des solidarités entre le « Nord » et le « Sud » à partir des besoins et des potentialités de l’Algérie, de l’Italie et de la Corse.
C’est donc au delà des réflexions générales et généreuses, à un exercice très concret que nous vous invitons à réfléchir, à partir d’une situation toute aussi concrète.
Je voudrais souligner une facette oubliée de ce débat et que nous entendons rappeler, non pas en raison d’une mode écologiste, mais parce qu’il y a là une grande question environnementale, que nous venons de soulever aux IVè Rencontres Méditerranéennes du Tourisme tenues il y a trois semaines à Grasse, en Provence Côte d’Azur.
30% du trafic maritime mondial des hydrocarbures transite par la Méditerranée. 30% du trafic maritime mondial, c’est à dire 250 super pétroliers et chimiquiers, bi-coques ou monocoques, navires modernes ou « bateaux poubelles », qui, chaque jour, passent au large des côtes de la Corse ou de la Sardaigne…
Nous ne sommes pas à l’abri d’une catastrophe de l’ampleur de celle qu’a connues, encore avec « Le Prestige », la Galice espagnole. Avec cette différence que la Méditerranée n’est pas l’Atlantique, que le plancton y est rare et de renouvellement lent. L’écosystème y est donc infiniment plus fragile qu’ailleurs.
En revendiquant l’approvisionnement par gazoduc de la Corse, on contribue aussi à réduire un trafic maritime et intense, et à risques.


Permettez-moi, -avant de vous remercier tous au nom des organisateurs d’avoir accepté de modifier des calendriers souvent chargés pour venir échanger ici, et sans doute avancer des pistes autour de questions qui, par leur exemplarité, intéressent chacun en Corse et en Sardaigne, mais aussi en Méditerranée-, de revenir sur une date symbole.
Il y a exactement 60 ans la Corse allait être la première partie du territoire national français à être libérée, à se libérer elle même grâce à l’action conjuguée de la Résistance et de l’Armée d’Afrique, en premier lieu des Goumiers marocains dont le Col de Teghime, au dessus de Bastia, rappelle le sacrifice.
Mais la liberté d’un peuple, comme celle du simple citoyen, ne peut être complète que lorsqu’il s’assure des moyens de vivre et de se développer.
L’accès à l’énergie et sa maîtrise, dans le cadre du service public, sont l’un de ces moyens de développement économique que le citoyen et les Etats doivent préserver aujourd’hui encore plus qu’hier.
Ce sont là des facteurs essentiels de l’égalité entre les citoyens, et de la paix entre les peuples.