Caravane antimafias 2005

GRASSE
Palais des Congrès Mardi 8 décembre

 

Extraits de la Conférence-débat
avec

Gian Carlo Caselli
, Procureur général de Turin, figure de proue de la lutte contre le terrorisme et la mafia.
Anna Bucca, fondatrice de la caravane anti mafias, chargée des relations internationales à ARCI Sicile,
Luigi Lusenti, président de ARCI Lombardie
Paul Euzière, président du Festival TransMéditerranée

 

 

" Pourquoi la mafia ? Pourquoi ici ? "

Propos introductifs de PAUL EUZIÈRE, président du FTM

Depuis 1993, le Festival TransMéditerranée a multiplié les initiatives les plus diverses : expositions, conférences-débats, films… sur ce thème pour deux raisons :

La mafia - historiquement - est née en Méditerranée, en Sicile. C’est la Cosa Nostra d’abord, puis la Camorra en Campanie, la 'Ndrangheta en Calabre, la Sacra Corona Unita dans les Pouilles.
Mail elle n’est pas limitée à l’Italie. Ni aux Italiens. Il n’y a pas de « gènes » mafieux, mais des contextes, des situations politico sociales  et des logiques géopolitiques qui conduisent au développement des mafias. Et nul n’est à l’abri. Bien au contraire.

Aujourd’hui, comme l’a très bien montré à Grasse l’an dernier le professeur Enzo Ciconte, l’Italie est le pays de quatre mafias autochtones, mais aussi de plusieurs mafias « extérieures » : albanao-kosovare, turque, russe, chinoise, nigériane…. On n'en est donc plus à un phénomène plus ou moins local, « folklorique », même à la façon de Salvatore Giuliano ou même du Parrain, mais à la structuration d’organisations criminelles transnationales qui se développent et mutent au rythme du processus de mondialisation, généralement - dans le plus grand silence – défient les Etats et menacent la citoyenneté.
Aujourd’hui, les mafias italiennes, albanophones, turques, japonaises (Yakuzas) et chinoises (Triades) constituent de véritables
puissances, avec des volontés autonomes et une capacité d’influence sur les relations internationales (…)

Pourquoi ici ?

Tout simplement parce qu’aucune zone du monde n’est à l’abri. Celles où l’on peut « faire rapidement de l’argent » - du blanchiment - sont des lieux de prédilection des mafias.
La Côte d’Azur est un de ces lieux de prédilection des mafias.Roger-Louis Bianchini l’a remarquablement montré dans un ouvrage il y a quelques années. Je ne parle pas ici de « Monaco, un affaire qui tourne » paru
aux éditions du Seuil et qui lui valut quelques procès retentissants qu’il gagna toujours, mais de « Mafias, argent et politique » (Ed du Seuil).

Sait-on par exemple que nombre de chefs mafieux arrêtés en France l’ont été dans le département des Alpes-Maritimes : camoristes, 'ndranghetistes, mafieux turcs et autres.

Sait-on aussi que 75% des 318 millions d’Euros investis par les Russes depuis 2001 en France l’ont été sur la Côte d’Azur ?


 Une caravane qui vient de loin...

Extraits des propos de ANNA BUCCA,
fondatrice de la caravane anti mafias, chargée des relations internationales à ARCI Sicile

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1) G.Falcone. 2) Attentat de Capaci. 3) P.Borsellino.



La caravane anti mafias a été créée en 1994 en réponse aux assassinats des juges Falcone et Borsellino.
Elle est aussi le prolongement des luttes de la paysannerie, des luttes des pacifistes contre la militarisation et pour le démantèlement des missiles de la base de Comiso…
La caravane anti mafias c’est en quelque sorte une synthèse de toutes ces luttes car le problème de la mafia se situe à un triple niveau : social, économique et culturel.
La lutte anti mafias est indissociable de celle pour la paix et les droits sociaux.

En ce sens, en œuvrant pour le droit à la citoyenneté, pour la justice sociale, pour la légalité démocratique la caravane agit pour la construction d’un nouveau projet politique, pour une société sans violences où l’être humain, le citoyen, est au centre de la réflexion et de l’action.

Contre le trafic des êtres humains

Extraits des propos de LUIGI LUSENTI, président de ARCI Lombardie

  Il est impératif de partager l’expérience de la caravane pour construire ensemble une réponse à la négation des droits. C’est pour cela que l’on a fait sortir la caravane de la Sicile vers le reste de l’Italie, puis vers d’autres pays.

Il est également important, comme c’est le cas à cette tribune, que le combat soit le fait de la société civile et des institutions. Enfin, il est essentiel de faire le lien entre légalité et progrès social et entre justice et droits.

(…)En Albanie, en Serbie et en Bosnie (où s’est rendue pour la première fois cette année la caravane anti mafias) il y a un grave problème de corruption, de crime organisé qui freine le développement économique et social.

(…)Contre la main d’œuvre clandestine et le trafic d’êtres humains c’est le mot d’ordre de cette année.
Le travail au noir, comme on l’appelle, est non seulement une source importante d’évasion fiscale, mais aussi de précarité et un déni des droits.C’est un terreau idéal pour les mafias
(…)Les Etats et les citoyens ensemble peuvent vaincre les mafias.

 


La répression oui, mais aussi la culture des droits du citoyen

Extraits de l’intervention de GIAN CARLO CASELLI ,
Procureur Général de Turin, Procureur de Palerme de 1993 à 1999, Représentant de l’Italie à Eurojust
(organisation de l’UE contre le crime organisé)

 (…) La mafia n’est pas qu’un phénomène local et ce n’est pas qu’une question criminelle.
C’est un phénomène économique et social, national et mondial ; une véritable entreprise.
Réduire le mot mafia à un singulier n’est pas juste et peut être dangereux. Les mafias accumulent une énorme richesse par le biais d’activités illicites (racket, trafic de drogue, d’armes, d’êtres humains, d’organes, de déchets toxiques…) et elles doivent blanchir cet argent.

Ce blanchiment se fait au travers de circuits financiers qui sont ceux du marché mondialisé lequel se caractérise par une extrême rapidité des échanges. Les mafias s’y intègrent très facilement.
D’où la nécessité de coordonner l’activité des Etats pour lutter contre l’influence grandissante des mafias et le recyclage, et surtout, commencer par les paradis fiscaux qui sont de véritables trous noirs absorbant les profits de cet argent blanchi.(…)

J’ai compris une chose très simple, mais très importante. Le lien entre la lutte pour les droits du citoyen et la lutte contre les mafias.
En effet lorsque les droits au travail, à la santé, à l’instruction, à la sécurité… ne sont pas garantis, la mafia en fait des « privilèges » des « cadeaux ». Les droits deviennent « faveurs ».

Se battre pour les droits fondamentaux du citoyen est déterminant dans la lutte contre les mafias.C’est la même chose pour ce qui est de l’emploi. Le droit au travail c’est la liberté et la dignité de l’homme.

(…) La lutte contre les mafias n’est pas seulement l’apanage de la police et de la magistrature. Il faut une prise de conscience du rôle négatif de la mafia et de son caractère global.
En réfléchissant, les gens s’aperçoivent vite que la mafia ce n’est pas seulement une question criminelle, mais c’est aussi une question économique, sociale et politique.
La mafia empêche le développement de l’économie. elle est la cause de l’appauvrissement du Sud de l’Italie.Du fait de l’activité mafieuse il y a eu un manque à gagner annuel de 180 000 emplois en Sicile. La perte financière est estimée à 7,5 milliards d’euros /an. Sans la mafia, le PIB du sud de l’Italie serait égal à celui des provinces du centre-nord de l’Italie.

Les produits présentés par cette caravane, qui proviennent des coopératives issues des terres confisquées aux mafieux (semoule, pâtes, vin…) sont l’expression même que la légalité permet de restituer aux gens ce que la mafia leur a dérobé. Grâce à ces coopératives, c’est du travail pour des jeunes qui n’en avaient pas jusque là.

(…)Si l’Italie, dit-on, est le pays des mafias, c’est aussi celui des anti mafias. L’Italie a su trouver des formes de réponses aux niveaux législatif, judiciaire et de la société civile. C’est le cas par exemple de la confiscation des biens des mafieux affectés à des actions d’intérêt collectif (coopératives, centres éducatifs, sociaux et culturels…).

 

 

• La totalité des textes des intervenants est disponible auprès du FTM

 

 

Bastia, Ajaccio, Grasse, Sainte-Tulle, Casablanca...

« La mafia si pu sconfiggere, purché lo si voglia davvero
e ci organizzi con intelligenza e coraggio »

« On peut vaincre la mafia à condition de le vouloir vraiment
et de s’organiser avec intelligence et courage
«  Gian Carlo Caselli

La Caravane anti mafias
2 au 7 décembre 2005


Le FTM et ses partenaires accueillent en France du 2 au 7 décembre, pour la 2è année, la caravane anti mafias.

Initiative citoyenne d’éducation et de sensibilisation à la lutte contre les mafias, la Caravane venant de Sardaigne fera étape en Corse et en Provence où sont organisées projections de films, conférence dans les lycées, rencontres avec des élus, magistrats, enseignants, syndicalistes, responsables d’associations, citoyens…

Créée en Sicile, en 1994, au plus fort des années de terreur mafieuse, la caravane a pour devise « En route pour la légalité démocratique et la justice sociale ». Elle est organisée par trois grands réseaux : l’ARCI, organisation sociale et culturelle de 1 200 000 personnes ; Libéra : 1300 associations d’éducation anti mafias et Avviso Pubblico, qui fédère les collectivités locales engagées dans ce combat. Elle sillonne l’ensemble des régions d’Italie et, depuis 2004, la France, puis, cette année l’Albanie, la Serbie, la Bosnie et le Maroc.

A l’occasion de sa venue en France, on pourra rencontrer personnalités et acteurs de terrain engagés dans le combat citoyen contre les mafias et le crime organisé notamment  Gian Carlo CASELLI, procureur de la république de Turin, membre d’EuroJust, Procureur général à Palerme qui a eu en charge ce lourd et dangereux dossier pendant les années sanglantes de la « pieuvre ».

La caravane conduite par des bénévoles et militants associatifs proposera des produits bio divers - vins, pâtes…- issus des coopératives créées sur les terres confisquées aux capi mafiosi..

• BASTIA

Vendredi 2 décembre: Conférence au lycée Jiocante de Casabianca, projection en avant-première au Régent de  "Saimir" de Francesco Munzi.

Samedi 3 décembre: Réception à l’Hôtel de Ville, rencontre débat sur la question de la laïcité et de la citoyenneté à l’occasion de la fête de "Terre Corse"

• AJACCIO

         

Dimanche 4 décembre: Rencontre avec les associations citoyennes et pacifistes sur le problème de la base nucléaire de la Maddalena. Sardaigne

Lundi 5 décembre: Projection en avant première de « Une fois que tu es né » film de Marco Tullio Giordana

• GRASSE

Mardi 6 décembre

Conférence:
Gian Carlo Caselli


Procureur de Turin, membre de EUROJUST, ancien Procureur général de Palerme

  Natif du Piémont, Gian Carlo Caselli, procureur de la République de Turin a toujours été « un magistrat en première ligne » de la lutte contre le terrorisme dans les années 70-80.

  Après avoir siégé au Conseil Supérieur de la Magistrature (de 1986 à 1990), il intègre la lutte anti mafias en 1992 lorsqu’il est nommé Procureur général de Palerme durant les années sanglantes au cours desquelles furent notamment assassinés les juges Falcone et Borsellino. En 1999, il est nommé Directeur général de l’administration pénitentiaire. Depuis 2001, il représente l’Italie à Eurojust, l’Organisation de l’Union Européenne contre le crime organisé.

Gian Carlo Caselli a écrit de nombreux essais dont «L’eredità scomoda. Da Falcone ad Andreotti. Sette anni a Palermo » (co écrit avec le juge Antonio Ingroia) Editions Feltrinelli 2001

• SAINTE - TULLE

Mercredi 7 décembre: Rencontre sur « Services publics, mafias et privatisations »

CASABLANCA

Jeudi 8 et vendredi 9 décembre: Ateliers avec « l’Espace Associatif » et l’Association démocratique des Femmes du Maroc »

• Le programme détaillé

télécharger le programme pdf

 

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